Jean-Claude Schmitt, Dr.
Histoire du Moyen Âge, Directeur d'Études, École des hautes études en sciences sociales, Paris
École des hautes études en sciences sociales, Paris
Né à Colmar, France
Études d'histoire à l'École Nationale des Chartes, Paris et à la Sorbonne et d'anthropologie sociale à l'École des Hautes Études en Sciences Sociales
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Histoire des rythmes
La question des rythmes sociaux a été posée pour la première fois par les fondateurs de l'anthropologie et de la sociologie (E. Durkheim, M. Mauss, G. Simmel) et les artistes du XIXe-XXe siècle (jazzmen, peintres abstraits) à un moment où l'Europe voyait ses rythmes traditionnels remis en cause par ses propres mutations internes (industrialisation, déchristianisation, urbanisation) et découvrait des rythmes différents (colonisation). Pourtant, les historiens ne lui ont pas accordé l'attention qu'elle mérite, bien qu'elle concerne tous les aspects de la vie en société. En me concentrant principalement sur la société européenne entre le Ve et le XVIe siècle, je propose de les étudier en croisant les problématiques et les méthodes de l'histoire et de l'anthropologie sociale et culturelle, tout en privilégiant une approche globale des documents - textes, images ou musique.- J'étudie en premier lieu les rythmes fondamentaux qui donnent vie et mouvement au corps de l'homme (le pouls du cœur, la respiration, les menstruations, la voix, les gestes) et régissent son insertion dans la nature et le cosmos (rythmes du jour et de la nuit, des saisons, des astres, des marées, le chant du coq).
- L'étude se concentre ensuite sur les formes de symbolisation du rythme, dans les mots de la langue latine et vernaculaire (poésie, chant) et les motifs ornementaux de la peinture ou de la sculpture, en rapport avec l'organisation symbolique du temps cyclique (calendrier, temps liturgique) et linéaire (histoire universelle ou histoires locales).
- Enfin, j'étudie les formes d'appropriation, de résistance et de conflit dont les rythmes sont l'enjeu, tandis que de nouveaux rythmes sociaux apparaissent (avec le développement urbain, la naissance de l'Etat, la circulation monétaire, la fiscalité), sans éclipser pour autant les rythmes traditionnels (travail agricole et artisanal, fêtes chômées, prélèvements seigneuriaux, alternance du Carnaval et du Carême). Les rythmes n'échappent pas à l'histoire et je formule l'hypothèse que non seulement les changements de rythmes - dans le travail, les déplacements spatio-temporels, la gestion des agendas individuels et collectifs - révèlent les transformations les plus profondes des sociétés, mais qu'ils contribuent à rythmer l'histoire et à en orchestrer les développements les plus chaotiques.
Lecture recommandée :
Schmitt, Jean-Claude. L'invention de l'anniversaire. Paris : Arkhé, 2009.
-. Le corps des images. Essais sur la culture visuelle du Moyen Âge. Paris : Gallimard, 2002. (Le Temps des images.)
-. Le corps, les rites, les rêves, le temps. Essais d'anthropologie médiévale. Paris : Gallimard, 2001. (Bibliothèque des Histoires.)
Colloquium, 14.12.2010
History of Rhythms
Similar to what Janis did less than a month ago, I will not be presenting just one but two narratives. The first is a fragmentary presentation of the work that I have been able to complete at - and by grace of - the Wissenschaftskolleg in the past two months, namely a rough introductory sketch of a book on the social rhythms in medieval Europe from the fifth to the fifteenth centuries. The paradox is that I will not be discussing the Middle Ages so much as concentrating on the period from 1800 to 2000. There are two reasons for this paradox. 1) We interpret the past with our modern-day categories, and so that is why I will be commencing with them. 2) In the particular case of rhythms, the year 1800 marked a turning point in progressive enlargement of the meaning of the word "rhythm," which ever since then has not exclusively concerned poetry and music, as had been the case ever since antiquity (rhythmos in Greek and rhythmus in Latin) until the end of the ancien régime (and this in all the European languages), but in the course of the nineteenth century it came to be progressively applied to all aspects of individual and collective life - the body and nature, the voice and song, work and leisure, the plastic arts and architecture, to schooling, voyages, communications, politics, the economy, fiscality, etc. The notion of "social rhythms" covers all those modern meanings of the term "rhythm." And it is with this "enlarged" notion of rhythm - unknown before 1800 - that I turn back to the Middle Ages so as to study (and through use of a wide array of texts and images) the characteristic rhythms of all these spheres, their relations and sometimes their contradictions (for example, when new rhythms compete with older rhythms). Unfolding over the longue durée, these relations gave their own "rhythm" to the historical development of medieval society. My second narrative will be only to give a concrete example of the medieval rhythms - but what that example is to be . . . will be kept a secret.
Publications from the Fellows' Library
Schmitt, Jean-Claude (2010)
Plädoyer für eine Geschichte der Rhytmen im mittelalterlichen Europa
Schmitt, Jean-Claude (2010)
Schmitt, Jean-Claude (2010)
Broder les rythmes : à propos de la tapisserie de Bayeux
Schmitt, Jean-Claude (Montreal, 2010)
Schmitt, Jean-Claude (Philadelphia, 2010)
The conversion of Herman the Jew : autobiography, history, and fiction in the twelfth century Conversion d'Hermann le juif. <engl.>
Schmitt, Jean-Claude (2009)
Schmitt, Jean-Claude (2009)
Schmitt, Jean-Claude ([Paris], 2009)
L'invention de l'anniversaire Essais
Schmitt, Jean-Claude (2008)
La pluralité interprétative : entre textes et images
Schmitt, Jean-Claude (Stuttgart, 2006)
Die Bekehrung Hermanns des Juden : Autobiographie, Geschichte und Fiktion La conversion d'Hermann le Juif <dt.>